Christelle Arnould pratique la pêche autour de Chalonnes-sur-Loire avec son conjoint. L’une des rares pêcheuses du Maine-et-Loire retrace son parcours depuis les Hautes-Pyrénées. Elle se confie sur ce qui l’anime et sur le monde masculin de la pêche où elle est parvenue à se faire une place.

De la truite des Pyrénées au silure de la Loire, il n’y a qu’un sport : la pêche. Christelle Arnould, 35 ans, la pratique depuis 2008. « J’ai accompagné mon frère deux-trois fois pour pêcher dans des rivières de montagne près de Tarbes dans les Hautes-Pyrénées, où nous habitions. En 2008, j’ai rencontré un motard qui pêchait. Je m’y suis mise et je suis devenue mordue de pêche », explique la trentenaire, approvisionneuse dans une entreprise spécialisée dans des machines de conditionnement de produits chimiques dans le Maine-et-Loire.
Arrivée en Anjou en 2012 après avoir rencontré un Angevin dont elle s’est depuis séparée, elle a décidé d’y rester. « La région m’a plu. » La pêcheuse a trouvé un travail « au rayon pêche du Décathlon de Ponts-de-Cé ». Elle a beaucoup appris auprès de son collègue, mais pas que. « Grâce à lui, j’ai rencontré Sébastien, mon compagnon. » Le couple habite à Chalonnes-sur-Loire et vient d’avoir son premier enfant, Manon.
Float tube, pique-nique et rencontres
Depuis la naissance de sa fille, Christelle Arnould a pour un temps arrêté la pêche. Sinon, elle et son conjoint exercent cette activité autour de leur commune, été comme hiver. Ils attrapent des silures, des perches, des brochets, des sandres et des black-bass avec des leurres. Ils s’y adonnent aussi en vacances, dans leurs familles près de Béziers (Hérault) et à Tarbes.

Le couple navigue sur les rivières et les lacs à bord d’un float tube, un siège-bouée. « C’est physique, il faut palmer pour se déplacer. » Il pêche et relâche des poissons toute la journée.
Son endroit préféré se trouve sur le Louet, un bras de la Loire, « une petite rivière sauvage. C’est notre petit paradis. Je profite et savoure les petits bruits de la nature. J’apprécie ce sentiment de liberté. Parfois, nous rejoignons des amis pour un pique-nique. Je ne vois pas ma vie sans la pêche. »
Grâce aux salons organisés par ses sponsors, Christelle Arnould rencontre des gens venus de toute la France. « C’est sympa. Nous nous invitons et échangeons sur les techniques de pêche. Chaque poisson a la sienne. »
L’accro de la canne à pêche aime aussi les défis et l’adrénaline liée au sport. Elle participe à des concours dans le département. Elle se rappelle qu’en octobre 2018, « il y avait deux femmes. D’habitude, je suis la seule. Nous avions sympathisé avec cette adolescente et son père sur les réseaux sociaux. Ils nous avaient demandé si nous pouvions les emmener pêcher un silure pour elle et un black-bass pour lui, à l’été 2018. Et fin octobre, après le concours, nous sommes ensuite partis chez eux en Normandie, pêcher des bars. »

Un « bonhomme à nichons » dans un monde d’hommes
Christelle Arnould fait partie des 1075 pêcheuses du Maine-et-Loire ayant la carte Découverte Femme. Pour s’intégrer et se faire respecter dans ce monde « macho et primaire », elle a dû s’imposer par son comportement. Elle se surnomme elle-même « bonhomme à nichons. J’ai adopté une attitude masculine sans être vulgaire. Je suis considérée comme un pêcheur. Je fais très attention à l’image que je renvoie, surtout sur les réseaux sociaux. Je ne porte pas de décolleté ou de short. Sinon je perds ma crédibilité. »
Malgré tout, ses compétences ont été remises en question par des pêcheurs malchanceux. « La pêche est un monde de jalousie. Entre août et septembre 2015, j’ai pêché trois silures de plus de deux mètres chacun. Alors que des hommes pêchent depuis des années et n’ont jamais réussi à en attraper. Pour eux, c’était impossible que j’arrive à pêcher seule un silure. »
La mordue de pêche a dû prouver ses capacités. « Nous, les femmes, ne devrions pas le faire », déplore-t-elle. Lors d’un concours sur float tube à Bouchemaine (Maine-et-Loire) où s’affrontaient 70 pêcheurs en octobre 2015, elle a attrapé un silure d’1 mètre 30. « J’étais la seule personne – et la seule femme aussi – à en avoir pêché un. J’étais super fière. J’apparaissais comme crédible aux yeux des autres. Je me suis faite une place dans ce milieu. Je ne l’ai volée à personne. J’ai réussi à gagner leur respect. »
Les freins à la pêche féminine
Selon Christelle Arnould, il existe plusieurs raisons pour lesquelles les femmes ne se lancent pas. « Le « côté nature » ne les attire pas. Pour certaines, la pêche se résume à rester au bord de l’eau. » Elle poursuit : « Avant même de connaître la pêche, l’épouse la déteste à cause des week-ends passés seule, son mari étant parti pêcher. »
D’autres pêcheuses se sentent mal à l’aise au contact d’hommes à l’attitude parfois lourde. Quelques-unes se tournent vers l’association Fishing Pluri’Elles. Elles peuvent hameçonner le poisson entre femmes.
Toutefois, leur nombre a augmenté de 20% en 2020 dans le Maine-et-Loire, selon la fédération de pêche du département. En 2019, 900 pêcheuses possédaient la carte Découverte Femme. En octobre 2020, elles sont 1075. Preuve que le milieu attire quand même les femmes.